La Bosnie-Herzégovine est le seul pays à dominante musulmane d'Europe.
La présence ottomane dans les Balkans y a laissé ses traces ici plus qu’ailleurs et, à ce titre, il aurait été dommage de passer à côté de ce jeune pays.
Car oui, si la région existe depuis des siècles, le pays en lui-même est né après la guerre civile de 1991-1995 qui éclata l’ancienne Yougoslavie en de multiples états.
Tito disait « La Yougoslavie a 6 républiques, 5 nations, 4 langues, 3 religions, 2 alphabets et 1 parti. »
Difficile avec tout ça de maintenir une unité après la mort du dictateur. Les nationalismes s’exacerbent, les querelles religieuses ressurgissent et l’étincelle des indépendances met rapidement le feu aux poudres.
La Bosnie symbolise à elle seule toute la guerre civile. C’est ici qu’eurent lieu les pires massacres et l’essentiel des destructions perpétrés par les Serbes.
A 13-14 ans, vous regardez ça de loin aux infos, vous entendez vaguement parler de Sebrenica ou Sarajevo et des histoires de votre oncle qui y est envoyé comme casque bleu mais ça ne vous évoque finalement pas grand-chose.
20 ans plus tard, quand vous y êtes, vous réalisez un peu plus l’ampleur des carnages et l’horreur d’une guerre qui eût essentiellement pour cibles des civils.
On commence la découverte du pays par le village de Mostar.
Mostar, vous en avez certainement aussi entendu parlé à la télé lors de la destruction en 1993 de son célèbre pont par les forces croates (car oui, il n’y a pas eu que les Serbes qui ont pris pour cible la Bosnie). Le pont est célèbre car il était le plus vieux d’Europe, construit au XVe siècle par les Ottomans.
Pour l’anecdote, on y trouve une petite version pas très loin, brouillon de l’architecte avant la construction du vrai. Il faut dire que le calife avait menacé de lui couper la tête en cas d’effondrement. Il parait que dès la fin des travaux, l’architecte préféra s’enfuir au cas où.
600 ans plus tard, le pont était toujours debout et il fallut y aller à coups de mortier pour l’écrouler.
Depuis, le pont a été reconstruit à l’identique avec des techniques et matériaux de l’époque grâce à un financement international.
Son arc caractéristique, surplombant la rivière turquoise est un pur joyau avec ses minarets dans le fond et ses maisons turques autour.
Des plongeurs perpétuent, moyennant finance touristique, la tradition séculaire des gardiens du pont en sautant du haut de l’édifice. Avec 3 mètres de fond, je précise évidemment que tout le monde ne refait pas toujours surface.
Le village est réellement magnifique et justifierait presque à lui seul le crochet par ce pays.
Il n’y a pas d’autoroute en Bosnie. Et il y a beaucoup de montagnes.
Autant dire que vous sentez passer les 150 km qui vous séparent de Sarajevo.
Mais la capitale se mérite.
Véritable carrefour culturel, Sarajevo fut souvent considérée comme la Jerusalem de l’Europe.
Les mosquées côtoient les cathédrales, les appels des muezzins font échos aux cloches des églises.
Les synagogues et les églises byzantines se font face,
le tout dans un urbanisme à la fois ottoman dans son vieux quartier de Baseskija, son bazar, ses echoppes et austro-hongrois dans ses bâtiments administratifs.
Sarajevo, c’est aussi la ville où tout bascula, le lieu qui précipita l’Europe dans les heures les plus noires de son histoire.
Le 28 juin 1914,100 ans jour pour jour, l’héritier de l’Empire d’Autriche-Hongrie, ne trouve rien de mieux à faire que de partir en visite officielle dans la ville.
Son convoi avance le long des quais, juste avant de tourner au niveau du pont latin.
C’est ici, en profitant de ce changement de direction que le nationaliste serbe Gavrilo Princip assassine l’archiduc et sa femme à bout portant.
Cet acte devient immédiatement le motif de déclaration de guerre de l’Autriche-Hongrie à la Serbie. A partir de là, le jeu des alliances s’enclenchent. La Russie déclare la guerre à l’Autriche-Hongrie. En retour la Prusse déclare la guerre à la Russie. La France et le Royaume Uni déclarent à la guerre à la Prusse. S’ajouteront l’Italie, la Turquie, les Etats-Unis, le Japon, l’Afrique. Le conflit devient mondial, dure 4 ans et cause 10 millions de morts.
Sarajevo restera éternellement associée à cet enchaînement tragique en en étant le déclencheur.
A la veille des célébrations du centenaire de cet événement, il me semblait important de venir ici et cela joua beaucoup dans la décision de ce voyage.
Mais Sarajevo reste malheureusement aussi célèbre pour son siège de 1000 jours entre 92 et 95, le plus long de l'histoire de la guerre moderne. Ville martyre, elle fut pilonnée par les forces serbes pendant 3 ans avec en moyenne 300 obus par jour. Comme Dien Bien Phu, la ville est naturellement encerclée par les montagnes et les batteries serbes; facilement positionnées en hauteur et surplombant la ville; purent s’en donner à cœur joie quand ce n’étaient pas les snipers qui semaient la terreur.
L’avenue principale de la ville qui la traverse d’ouest en est fut rapidement surnommée Sniper Alley. Près de 1500 personnes tentant de la traverser furent ainsi tuées pendant le conflit, des primes étant accordées aux snipers quand il s’agissait de femmes.
Les bâtiments gardent volontairement les traces des mitrailles, des obus et parfois même du sang tels des mémoriaux à ciel ouvert.
Outre le courage, la persévérance de ses habitants et la présence des casques bleus, le siège de Sarajevo ne put durer que grâce à un tunnel secret construit sous l’aéroport contrôlé par l’ONU reliant la ville encerclée avec sa périphérie libre. Ce tunnel de la vie, comme il est appelé ici, véritable cordon ombilical, fut creusé par une famille à partir de sa maison pendant 4 mois et sur près de 2 km.
Il permit d’évacuer les blessés et d’alimenter la ville en nourriture et en munitions pour résister aux attaquants.
Ce tunnel et la maison de la famille devenue musée se visitent aujourd’hui et ne vous laisseront certainement pas indifférents.
La population bosniaque est profondément sympathique et accueillante (la propriétaire de notre auberge qui a foncé m'acheter des médicaments à la pharmacie alors que j'étais en pleine crise d'allergie, le vendeur de fruits et légumes qui m'a couru après pour me rendre la monnaie sur les 10 fois plus que je lui avais donné), et même 20 ans après, les discussions ne sont jamais très loin de la guerre civile et du siège de Sarajevo. En tant que français, ils gardent malgré tout une rancœur certaine contre Mitterrand qui aurait déclaré que rien de spécial ne se passait à Sarajevo et qu’il fallait laisser le temps au temps. Le lendemain de sa visite les Serbes repilonnaient la ville dans l’indifférence internationale la plus totale.
Aujourd'hui Sarajevo est une ville qui peine à sortir de l'après-guerre. Le chomage touche près de 40% de la population mais les habitant en ressortent avec une farouche volonté de vivre. De nombreux festivals sont organisés chaque année, la culture est omni-présente et le tourisme commence enfin à affluer.
La présence ottomane dans les Balkans y a laissé ses traces ici plus qu’ailleurs et, à ce titre, il aurait été dommage de passer à côté de ce jeune pays.
Car oui, si la région existe depuis des siècles, le pays en lui-même est né après la guerre civile de 1991-1995 qui éclata l’ancienne Yougoslavie en de multiples états.
Tito disait « La Yougoslavie a 6 républiques, 5 nations, 4 langues, 3 religions, 2 alphabets et 1 parti. »
Difficile avec tout ça de maintenir une unité après la mort du dictateur. Les nationalismes s’exacerbent, les querelles religieuses ressurgissent et l’étincelle des indépendances met rapidement le feu aux poudres.
La Bosnie symbolise à elle seule toute la guerre civile. C’est ici qu’eurent lieu les pires massacres et l’essentiel des destructions perpétrés par les Serbes.
A 13-14 ans, vous regardez ça de loin aux infos, vous entendez vaguement parler de Sebrenica ou Sarajevo et des histoires de votre oncle qui y est envoyé comme casque bleu mais ça ne vous évoque finalement pas grand-chose.
20 ans plus tard, quand vous y êtes, vous réalisez un peu plus l’ampleur des carnages et l’horreur d’une guerre qui eût essentiellement pour cibles des civils.
On commence la découverte du pays par le village de Mostar.
Mostar, vous en avez certainement aussi entendu parlé à la télé lors de la destruction en 1993 de son célèbre pont par les forces croates (car oui, il n’y a pas eu que les Serbes qui ont pris pour cible la Bosnie). Le pont est célèbre car il était le plus vieux d’Europe, construit au XVe siècle par les Ottomans.
Pour l’anecdote, on y trouve une petite version pas très loin, brouillon de l’architecte avant la construction du vrai. Il faut dire que le calife avait menacé de lui couper la tête en cas d’effondrement. Il parait que dès la fin des travaux, l’architecte préféra s’enfuir au cas où.
600 ans plus tard, le pont était toujours debout et il fallut y aller à coups de mortier pour l’écrouler.
Depuis, le pont a été reconstruit à l’identique avec des techniques et matériaux de l’époque grâce à un financement international.
Son arc caractéristique, surplombant la rivière turquoise est un pur joyau avec ses minarets dans le fond et ses maisons turques autour.
Des plongeurs perpétuent, moyennant finance touristique, la tradition séculaire des gardiens du pont en sautant du haut de l’édifice. Avec 3 mètres de fond, je précise évidemment que tout le monde ne refait pas toujours surface.
Le village est réellement magnifique et justifierait presque à lui seul le crochet par ce pays.
Il n’y a pas d’autoroute en Bosnie. Et il y a beaucoup de montagnes.
Autant dire que vous sentez passer les 150 km qui vous séparent de Sarajevo.
Mais la capitale se mérite.
Véritable carrefour culturel, Sarajevo fut souvent considérée comme la Jerusalem de l’Europe.
Les mosquées côtoient les cathédrales, les appels des muezzins font échos aux cloches des églises.
Les synagogues et les églises byzantines se font face,
le tout dans un urbanisme à la fois ottoman dans son vieux quartier de Baseskija, son bazar, ses echoppes et austro-hongrois dans ses bâtiments administratifs.
Le 28 juin 1914,100 ans jour pour jour, l’héritier de l’Empire d’Autriche-Hongrie, ne trouve rien de mieux à faire que de partir en visite officielle dans la ville.
Son convoi avance le long des quais, juste avant de tourner au niveau du pont latin.
C’est ici, en profitant de ce changement de direction que le nationaliste serbe Gavrilo Princip assassine l’archiduc et sa femme à bout portant.
Cet acte devient immédiatement le motif de déclaration de guerre de l’Autriche-Hongrie à la Serbie. A partir de là, le jeu des alliances s’enclenchent. La Russie déclare la guerre à l’Autriche-Hongrie. En retour la Prusse déclare la guerre à la Russie. La France et le Royaume Uni déclarent à la guerre à la Prusse. S’ajouteront l’Italie, la Turquie, les Etats-Unis, le Japon, l’Afrique. Le conflit devient mondial, dure 4 ans et cause 10 millions de morts.
Sarajevo restera éternellement associée à cet enchaînement tragique en en étant le déclencheur.
A la veille des célébrations du centenaire de cet événement, il me semblait important de venir ici et cela joua beaucoup dans la décision de ce voyage.
Mais Sarajevo reste malheureusement aussi célèbre pour son siège de 1000 jours entre 92 et 95, le plus long de l'histoire de la guerre moderne. Ville martyre, elle fut pilonnée par les forces serbes pendant 3 ans avec en moyenne 300 obus par jour. Comme Dien Bien Phu, la ville est naturellement encerclée par les montagnes et les batteries serbes; facilement positionnées en hauteur et surplombant la ville; purent s’en donner à cœur joie quand ce n’étaient pas les snipers qui semaient la terreur.
L’avenue principale de la ville qui la traverse d’ouest en est fut rapidement surnommée Sniper Alley. Près de 1500 personnes tentant de la traverser furent ainsi tuées pendant le conflit, des primes étant accordées aux snipers quand il s’agissait de femmes.
Les bâtiments gardent volontairement les traces des mitrailles, des obus et parfois même du sang tels des mémoriaux à ciel ouvert.
Il permit d’évacuer les blessés et d’alimenter la ville en nourriture et en munitions pour résister aux attaquants.
Ce tunnel et la maison de la famille devenue musée se visitent aujourd’hui et ne vous laisseront certainement pas indifférents.
La population bosniaque est profondément sympathique et accueillante (la propriétaire de notre auberge qui a foncé m'acheter des médicaments à la pharmacie alors que j'étais en pleine crise d'allergie, le vendeur de fruits et légumes qui m'a couru après pour me rendre la monnaie sur les 10 fois plus que je lui avais donné), et même 20 ans après, les discussions ne sont jamais très loin de la guerre civile et du siège de Sarajevo. En tant que français, ils gardent malgré tout une rancœur certaine contre Mitterrand qui aurait déclaré que rien de spécial ne se passait à Sarajevo et qu’il fallait laisser le temps au temps. Le lendemain de sa visite les Serbes repilonnaient la ville dans l’indifférence internationale la plus totale.
Aujourd'hui Sarajevo est une ville qui peine à sortir de l'après-guerre. Le chomage touche près de 40% de la population mais les habitant en ressortent avec une farouche volonté de vivre. De nombreux festivals sont organisés chaque année, la culture est omni-présente et le tourisme commence enfin à affluer.
1 commentaire:
Merci pour ce petit bout d'histoire Européenne et pourtant si loin de nous…
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