Chroniques de là-bas

Le sens de la nuance

Quand j'étais petit, mon pompier volontaire de papa me racontait que pour éteindre un incendie, ses confrères américains inondaient le bâtiment concerné. Je n'ai jamais vérifié si c'était vrai mais j'y pense plusieurs fois par jour. En fait, à chaque fois que les sonneries des camions transpercent le double vitrage de mon appartement. Il  y a aussi les sonneries des ambulances et celles des voitures de police. Parce que ces hommes sont des "héros" et quand ils se déplacent, il faut que la ville les entende. Aux Etats-Unis, le bruit fait partie du paysage. Et les hamburgers sont énormes, les voitures aussi.

La critique n'est pas nouvelle. L'Amérique vie en noir et blanc. Dans un pays où Dieu est sur les billets de banque, le Bien et le Mal laissent peu de place à la mesure. Le "avec ou contre nous" s'impose de fait. C'est difficile à accepter pour 1) un latin et 2) un français. Les Lumières ont inventé l'esprit critique et le manque de discipline fait partie du quotidien hexagonal. Ici, le pragmatisme règne. Quand le Congrès vote une loi, il est impensable qu'elle ne soit pas appliquée. Donc que les citoyens ne la respectent pas.

Nous avons nos illusions, les Américains ont les leurs. Comme celle de croire que celui qui travaille est récompensé et que celui qui est dans la rue l'a cherché alors que le népotisme marche aussi bien qu'ailleurs (résultat d'une étude récente sur la réalité du rêve américain). Quelqu'un n'aime pas l'Amérique? C'est qu'il n'aime pas la liberté. La sécurité sociale? Le début du socialisme. La philosophie Terminator, frappe d'abord, discute après, fonctionne à plein.

Les médias parlent beaucoup en ce moment de Trayvon Martin, un adolescent  noir de 17 ans tué par un agent d'une milice de quartier laissé en liberté depuis. Le gamin n'avait rien fait de mal a priori. A part mettre sa capuche pour aller au supermarché alors qu'il faisait nuit. Le manque de nuance, c'est un peu lèg comme motif de légitime défense.